Une aventure humaine enrichissante
Je reviens d’une mission au Bangladesh, au titre de l’association AJHA dans laquelle je suis engagé depuis une bonne dizaine d’années maintenant. J’étais accompagné de deux administrateurs natifs de cette région.
Le contexte de la mission
Le but était de se rendre compte sur place des actions menées dans les deux programmes engagés depuis plus de cinq ans et de mieux se connaître entre partenaires. J’ai eu la chance d’être accueilli dans les familles de mes collègues originaires de la province de Kagrachari située au sud-est du Bangladesh, près de la Birmanie. C’est une des trois provinces peuplée de minorités bouddhistes, perdues au milieu de l’immense majorité bengalie (150 millions d’habitants pour une surface quatre fois plus petite que la France). Ils doivent donc lutter en permanence contre les discriminations et la colonisation progressive de leurs terres. Pour les étrangers comme moi, un permis d’entrée est obligatoire et il est interdit pour eux de se réunir avec nous sans la présence de militaires…
Nous avons néanmoins pu réaliser notre mission sans problème grâce au réseau de partenaires locaux extrêmement solidaires et efficaces et aux liens familiaux de mes amis. J’ai été frappé par les qualités d’accueil, de gentillesse et de simplicité de mes hôtes. Ils se mettent en quatre pour qu’on se sente bien, qu’on puisse rencontrer qui on veut, qu’on puisse visiter les réalisations entreprises ensemble.

paysage typique des Chittagong Hill Tracts
Dans ce pays à très faible pouvoir d’achat, je me suis senti une nouvelle fois « nanti occidental ». Le décalage est immense au point de vue du confort, du niveau de vie, des transports, des loisirs, de l’éducation des jeunes, de l’avenir, du climat, etc. Comment imaginer, par exemple, que la corruption est présente partout dans l’administration ? Que les grèves sont lancées par les partis d’opposition et qu’elles durent toute la semaine, paralysant les transports et les administrations ? Que les jeunes non éduqués sont sans avenir et condamnés à survivre dans leur village ou à échouer dans les grandes métropoles ? (Dhaka : 20 millions d’habitants, que j’appelle « mégalopole de la survie » !) Cela m’a conforté dans cette voie de solidarité internationale que je me suis tracée depuis longtemps.
L’évolution positive du collège de Tarabunia
Je voulais vous parler, tout spécialement, du collège de Tarabunia que nous avons construit en 2011. C’est un de nos deux programmes au Bangladesh. Les trois salles de classe et la salle de professeurs se dressent fièrement à l’entrée de ce village perdu au fond de la province où vivent les populations tribales de l’ethnie Chakma. Ce collège permet aux enfants des minorités ethniques de continuer leurs études après le primaire. Le coût des études est de 0,20 euro par mois par enfant, étant donné la pauvreté des familles.

l’arrivée à Tarabunia avec le collège au fond
On peut dire qu’il est victime de son succès. Il accueille de plus en plus d’élèves qui viennent maintenant des villages voisins. Il avait démarré timidement avec 16 élèves. Aujourd’hui, il atteint 81 élèves pour les trois classes (33 élèves en première année). Notre objectif de 120 élèves sera vite atteint. Nous offrons aussi une continuité aux élèves méritants en leur permettant de continuer leurs études jusqu’à la fin du secondaire à Moanoghar, internat de 1350 élèves situé dans la province voisine de Rangamati. C’est dans cet établissement, né en 1974, que nous avons notre deuxième programme en parrainant une quarantaine d’enfants et en soutenant divers projets liés à la santé, à l’éducation et au développement.
A vrai dire, nous avons été enthousiasmés par le dynamisme du Comité de Parents qui gère le collège. Nous nous sommes aperçus qu’il s’implique fortement aussi bien dans les inscriptions et le suivi des élèves que dans l’aménagement des installations : clôture en bambou autour du terrain, plantations, installation de l’électricité, forage d’un puits et montage d’une rampe de robinets et de toilettes pour les enfants, grâce à une ONG locale. Il est entendu qu’il prend en charge la maintenance des locaux et du mobilier. Il a organisé, en notre honneur, un spectacle en plein air avec comédie et danses traditionnelles. Tout le village était là !
Côté professeurs, leur sérieux nous a rassurés. En plus des cours normaux, ils dispensent même gratuitement des cours de soutien le matin ! Ils sont au nombre de six, principal inclus, auxquels il convient d’ajouter un secrétaire et un gardien. L’équipe est maintenant au complet. Nilotpal, le principal, qui est jeune et dynamique, est formé cette année à sa nouvelle fonction en se rendant à Chittagong deux jours par semaine (quatre heures de trajet !).

l’équipe des professeurs du collège
Devant tous ces visages, ces sourires, ces espoirs, nous nous sentons portés en nous disant que ce projet était un bon choix. Nous avons senti le bonheur exprimé par un parent dont les deux enfants ont terminé leur scolarité au collège l’an passé et qui poursuivent aujourd’hui avec succès leurs études à Moanoghar. Seule l’éducation pourra permettre à ces futurs adultes d’avoir un esprit critique pour se défendre, d’envisager un métier. Mais en même temps, nous sentons la lourde responsabilité d’assumer ce soutien moral et financier.

le village entier nous accueille
Les enjeux financiers
Pour l’instant, AJHA assure le paiement des salaires et des coûts pédagogiques. Cette charge a augmenté cette année car l’équipe est maintenant au complet et, de plus, l’euro a nettement baissé par rapport à la monnaie locale indexée sur le dollar. Elle s’élève, cette année, à plus de 7 500 euros. Comment finançons-nous ces salaires ? La vente de vin en fin d’année (à laquelle beaucoup d’entre vous participent) apporte une contribution de 3 000 euros environ, ce qui est magnifique ! Nous complétons les recettes grâce à une dizaine de donateurs qui parrainent cette action, en faisant un don ponctuel ou mensuel. Par exemple, un virement mensuel de 30 €, éligible pour le crédit d’impôt qui est de 66%, revient en fait à 10 € par mois pour le donateur. Quant aux subventions du Conseil Régional des Pays de la Loire, elles ont été consacrées essentiellement à la construction des locaux et à la formation des professeurs.
Il paraît maintenant impensable d’arrêter cet élan. Si on fait le bilan, nos recettes sont aujourd’hui un peu justes et nous obligent à « piocher » dans nos fonds propres. Notre objectif est de faire enregistrer le collège auprès du Ministère de l’Education pour qu’il devienne établissement public. Les salaires seront alors pris en charge par l’Etat. Le chemin est plus long que prévu et il faut tenir au moins cinq années encore ! Pour assurer cette phase transitoire, il nous faudrait quelques donateurs supplémentaires. Face au dénuement de ces familles et à l’immense espoir que nous avons suscité, ce geste arriverait à propos ! Si vous souhaitez vous engager un peu plus à nos côtés dans cette aventure exaltante et participer à cette dynamique, contactez-moi.
Merci de votre lecture et de votre soutien. Sincères amitiés.